L'autonomie peut se définir comme le fait de vivre en accord avec ses valeurs et en répondant à ses propres besoins, sans dépendance au "système".
Le système?
Selon Wikipedia, un
système est un ensemble d'éléments interagissant entre eux selon certains principes ou règles. Un système est constitué d'un but, de ressources (humaines, naturelles, matérielles ou non...), d'interactions entre les ressources, d'une organisation (règles), d'une frontière (on peut appartenir au système ou on peut lui être externe, et appartenir donc à son environnement) et d'interactions avec l'environnement.
Voilà pour la définition générique. Mais qu'est ce que "le système"? A quoi s'oppose les gens "antisystèmes"? A priori, on désigne ainsi plutôt un système politique. Être antisystème, c'est critiquer les institutions politiques dominantes. La politique étant cependant à la racine des autres systèmes, être antisystèmes peut aussi vouloir dire s'opposer au système financier, au système économique, au système de santé, au système juridique...Bref, ne pas être d'accord avec l'état actuel des choses en général. Il peut donc être utile, quand on se revendique antisystème, d'expliquer exactement quel système on rejette.
En l'occurrence, ce qui ressort le plus souvent sur les blogs d'autonomie, c'est une recherche d'
autosuffisance alimentaire et énergétique. Les motivations peuvent varier : il peut s'agir d'une
volonté de sécurité (même sans emploi, on peut survivre dans des conditions décentes), d'un
désir écologique (la nourriture étant locale et l'énergie renouvelable, être autonome est écologique par nature), d'une volonté de r
etour aux sources...Le système rejeté est alors plutôt le
système capitaliste - sa compétition permanente, son impact sur l'environnement, le détachement de la réalité qu'il a engendré dans les sociétés occidentales.
Pourquoi en arriver là? Est-ce bien nécessaire?
Il y a bien d'autres manières de lutter écologiquement et socialement que la quête d'autonomie. Cependant,
changer le système de l'intérieur est loin d'être évident. Les manifestations, les pétitions...peuvent fonctionner pour des mesures mineures, mais ne sont pas efficaces pour les décisions plus conséquentes. Plutôt que de s'arc-bouter en ce sens,
l'autonomie est une sorte de boycott du système. Si on vit hors système, on ne le finance plus ; si il n'y a plus assez de personnes pour financer le système, il s'écroulera, ou sera obligé de s'adapter. Pour d'autres, le système est fichu de toute façon (collapsologie), et l'autonomie est
une manière d'anticiper sa chute pour ne pas trop en souffrir.
L'idée de la vie en autonomie comme solution aux crises écologiques et sociales peut toutefois se heurter à quelques
critiques. D'abord, ce mode de vie est loin de faire rêver tout le monde, et nombreux sont ceux à arguer qu'au nom de leur
liberté individuelle, ils ont parfaitement droit de s'enfoncer dans un consumérisme ravageur si cela leur fait plaisir (ce à quoi on peut tout de même gentiment leur répondre que "la liberté des uns s'arrêtent là où commencent celles des autres", et qu'ils empiètent de toute évidence grandement sur celle des générations futures et des opprimés du système). Ensuite, comme la vie en autonomie est un choix et non pas une obligation, on peut
douter de son efficacité finale (si seulement 5% de la population fait des efforts, la situation écologique ne risque pas de s'améliorer, et espérer convertir une majorité dans le peu de temps qui nous est imparti semble assez utopique). Enfin, vivre en communauté autonome est loin d'être une sinécure : juridiction compliquée, accords municipaux quasi impossible à obtenir et susceptible d'être révoqués chaque année, tensions inhérentes à la vie en communauté, investissement initial conséquent, risque d'être tout simplement évacué par les CRSS du jour au lendemain...De quoi décourager les bonnes volontés.
A quoi ça ressemble?
La vie en autonomie peut prendre plusieurs formes - tout dépend de l'autonomie qu'on cherche à atteindre :
- Si on vise une autonomie alimentaire juste pour soi et sa famille, une maison à la campagne avec un lopin de terre bien entretenu peut suffire.
- Si en plus de ça on veut atteindre une autonomie énergétique, mieux vaut avoir un habitat adapté et des installations pour profiter des ressources renouvelables (soleil, vent, bois...).
- Si ce qui compte pour nous est simplement d'être libre tout en ayant une sécurité et un confort minimaux assurés, un habitat mobile (van, tiny house, etc) peut faire l'affaire. Les survivalistes leur préféreront la BAD (base autonome durable), qui permet de survivre longtemps en cas de catastrophe détruisant le système.
- Enfin, pour ceux qui cherchent une autonomie "totale", mieux vaut former une communauté de personnes partageant des aspirations similaires - on parle alors d'écovillage, d'écolieu, de communautés autonomes...Cette forme est cependant la plus difficile à atteindre, car dépendant de beaucoup d'éléments extérieurs.
Quelques mots à ne pas confondre
L'
autosuffisance consiste à se suffire à soi-même au niveau économique, càd ne pas dépendre des autres. Ce terme a une connotation assez individuelle.
L'
autarcie implique l'autosuffisance totale, mais véhicule aussi une idée d'une famille ou d'une communauté fermée au reste du monde, d'un territoire bien distinct du reste du monde (un peu en mode "Captain Fantastic", pour ceux qui l'on vu).
L'
autonomie, littéralement "être l'auteur de ses propres normes", peut se définir comme le fait de décider par soi-même des modes de production de ce qu'on consomme, et que ceux-ci soit soient à la fois justes et durables. On parle généralement de communautés autonomes, où l'organisation sociale est une part importante de l'autonomie. L'autonomie est moins "extrême" que l'autarcie dans le sens où les échanges entre les individus gardent une place importante et qu'il n'y a pas d'exclusion volontaire du reste du monde.
L'
indépendance traduit à la fois l'absence d'attaches à une organisation et une volonté de n'être soumis à rien et influencé par personne - ce terme a une connotation vindicative (guerre d'indépendance, lutter pour son indépendance...).
Tous ces mots ont un peu tendance à être utilisés les uns à la place des autres, et certaines nuances font largement débat (entre autonomie et autarcie, notamment).
Les bases de l'autonomie
Ici, je vais être assez synthétique, car chacune des bases méritent un (voire plusieurs) article détaillé. On est donc en bonne route vers l'autonomie quand on a considéré les points suivants :
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L'acquisition d'un terrain : Un hectare nourrit en moyenne une 20aine de personnes. La terre classée comme cultivable (mais non constructible) coûte en moyenne 5000 euros l'hectare, mais c'est extrêmement variable en fonction des régions. Il est également possible de se faire prêter un terrain par une association, de le louer ou squatter un terrain abandonné.
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La construction d'une maison : Pour avoir une maison écologique sans y laisser un bras, l'autoconstruction est conseillée. Ils existent de nombreuses écoles : Maison en terre, éco-dome, maison en bois et paille, earthship, tiny house, yourte, habitat groupé, aménagement de grottes...
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S'assurer un apport en eau et en énergie, et ce sans être relié au système commun. Ici, on est plutôt dans les installations techniques : panneaux solaires, éoliennes, récupérateur et purificateur d'eau de pluie, chauffage au bois, batteries...On peut aussi chercher à réduire sa consommation : toilettes sèches, douche à vaporisation, fraidier (frigo naturel sous-terre), cuisinière à bois, chauffage géothermique, éclairage aux lampes à huiles (pour les plus motivés).
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Créer son potager. Là encore, plusieurs pistes sont à explorer : la permaculture, l'agriculture du non-agir, la biodynamie [plus ésotérique], le compostage, la construction des outils...
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Apprendre à faire soi-même : Les conserves, les produits ménagers, la nourriture, les savons, les soins, la couture, le pain, la poterie, la menuiserie, et bien d'autres encore! Bien sûr, à ce jeu là, on peut aller loin, et c'est à chacun de décider ce qu'il préfère faire lui même et ce pour quoi il accepte de dépendre d'autrui pour libérer son temps.
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Le fonctionnement de la vie commune : essentiel dans le cas d'une communauté autonome. Les questions de la prise de décision, de la présence ou non d'argent, de la répartition du travail, des valeurs et travaux prioritaires se doivent d'être considérées avec attention.
Les limites de l'autonomie
(reprise d'un commentaire fait plus bas)
Certaines autonomies sont difficiles, voir impossible à atteindre, et il faut je pense accepter que
certains domaines sont par nature difficile à gérer à petite échelle - les soins par exemple. Même si nous visons une autonomie totale, nous n'envisageons pas de nous en passer, car nous n'envisageons pas de sacrifier des vies humaines qui pourraient être sauvées (ce qui est assez normal). On peut donc
essayer d'être moins dépendant dans le domaine (en s'appuyant sur la phytothérapie ou sur les massages, en faisant beaucoup d'efforts sur la prévention, en encourageant un mode de vie sain) mais il est
indispensable d'identifier clairement ses limites pour ne risquer la santé de personne.
Il me semble que la découpe est à peu près la suivante :
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Autonomies atteignables [mais qui peuvent tout de même nécessiter des achats de matière première]: la nourriture, l'eau, l'énergie, l'habillement, les transports sur courte distance, l'élevage, la construction de bâtiments, la production d'objets en bois/paille/terre/laine/cuir.
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Autonomies assez difficiles à atteindre : l'argent, la production d'objets en métal/verre/plastique/pierre, la gestion des déchets.
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Autonomies impossible à atteindre [ou alors à l'échelle de tout le pays]: Les transports longue distance, les soins médicaux, la politique, la défense militaire.